Louise Desrenards on Fri, 24 Jan 2003 19:14:33 +0100 (CET) |
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[nettime-fr] Scorcese: le maître du cinéma de représentation serait-il ledernier en demeure vrai... |
puis-je faire un message militant, cela paraîtrait-il étrange, disant qu'il faut absolument aller voir le dernier Scorcese "gangs de New-York"? C'est le film le plus radicalement infra et extra politique qui règne sur les écrans depuis plusieurs années... Ce film est un chef d'oeuvre du cinéma, de l'amour du cinéma, de la maîtrise du cinéma comme de la résistance du cinéma, en tant qu'il demeurerait une arme de représentation de masses puissante malgré les castings à la c... (le petit et la petite sont certes charmants mais un peu relâchés dans les plans larges ;-) Résistance critique aux clichés tout en sachant qu'ils sont le langage alpha du cinema actuel roulant après les medias... Sous la métaphore des tours : Nous sommes loin de Spielberg, voyez par exemple la sauvegarde divine des Twin Towers dans AI : Jugez-donc, comment vouliez-vous qu'un Spielberg et son équipe puissent imaginer un instant en prospective dans la scénographie de New-York détruite par la submersion des eaux (fusion de la calotte glacière suite au réchauffement terrestre), que le symbole du fric libre échangé, celui du commerce comme conquête démocratique de la puissance et comme défi, allait se casser la gueule matériellement et symboliquement, en amont de sa vision prospective!!!... Pas de bol le film fut trop long à monter et à finir, les pilotes des deux avions trop rapides et précis, et plus influencés par la pub et la télé que par le cinéma... ;-) Non. Dans le film de Scorcese il ne s'agit pas d'une erreur prospective liée au temps de gestation de la post-production (dont la programmation de la distribution de longue date prévue) juste avant et un poil après les événements qui retournèrent la façon américaine dans le monde, le film dont nous voulons au contraire parler serait-il le fruit des plus longues durées des mises en oeuvre au cinéma, puisqu'il commença à être imagine en 1974, et demanda lui aussi trois ans pour être fabriqué... Dans ce cas il s'agit d'une finition de dernière minute et du choix d'arrêter à ce point l'évolution du skyline : car Scorcese, désormais roi du cinéma sinon de la ville de NY elle-même (il a commencé à en retracer l'histoire urbaine moderne) sait bien qu'en ellipse nous faisons disparaître les tours nous-mêmes en imagination prolongeant d'un plan le profil resté en suspens... Le cinéma c'est l'art de la scène à lecture centrifuge ‹ Bazin -. En quoi la métaphore en langage du cinéma se fonde dans l'ellipse et non dans l'allégorie. ("L'ellipse est à Bresson ce que la métaphore est à Proust", Odette Dagan)... Il faudrait que Spielberg se souvienne de cela, peut-être au-delà de toutes les géniales performances qu'il est capable de produire et de construire, pour devenir le maître qu'il n'est pas encore tout à fait... Au contraire dans "gangs de New-York" l'effet spécial de la réapparition fantômale des twin towers dans les derniers plans du skyline, pour finir le film par une évolution accélérée de l'évolution urbaine de la ville (par contamination : de sa société), introduit de la même façon une relation métaphorique directe entre le 11 septembre et toutes les formes d'événement de la violence des corps et au corps par la loi, tant celle des gangs que celle de la démocratie notamment américaine, restituées sans en oublier une seule dans le scénario ni la mise en scène du film (y compris le découpage des scènes collectives de violence: l'esthétique comme violence éthique substituant la violence matérielle au regard des spectateurs)... Toutes y sont représentées excepté l'obscénité puisqu'elle en aurait expurgé le sens! En quoi il est politiquement engagé sur la question du fonds et de la forme autant que des démocraties associées au totalitarisme à l'horizon du mondialisme... Et engagé par rapport au cinéma, d'être allé faire revivre la ville que fut Rome pour le cinéma, "Cine citta" : pour cela d'avoir rencontré un des plus grands producteurs de Fellini et les ultimes détenteurs de la mémoire artisanale des métiers de la scène (costumes décors etc...) qui d'avoir travaillé avec le dernier maître vivant du grand cinéma italien en furent forgés, eux ou leurs descendants encore vivants... quand le cinéma italien en tant qu'économie, nombre de production ‹ et 7è art ‹ est raide mort aujourd'hui. Mais de plus en réglant ses comptes avec les Italiens de Venise qui l'avaient tué à propos du "Temps de l'innocence" (trop de plans complaisants sur les signes de richesse et du goût, il se serait donc pris à tort pour Visconti ce pédant)... Oui Scorcese aujourd'hui pourrait bien manifester par ce film qu'il est le maître incontesté de ce qu'il résulte du fonds culturel euro-américain dans l'histoire du 7è art. Il est le maître incontesté du cinéma (cet art technique, ne pas l'oublier y intégrerait-on le numérique via les effets spéciaux présents à tous les niveaux du film et jusqu'au montage). Aller voir Daniel D. Lewis et Scorcese lui-même dans "Gangs de New-York" est incontournable pour ne pas mourir idiot sur la question de la tradition culturelle américaine... La carrière européenne de ce film est vitale, car les Etats-Unis en boycottent la distribution et les critiques en boycottent l'intérêt, comme tout grand film critique des Etats-Unis toujours fut victime à commencer par le premier Pancho Villa et à finir par Les Portes du Paradis (cloué au piloris fut son réa pendant plus d'une décennie...) Il y a derrière ce film un livre exceptionnel de Ashbury écrit au début du siècle dernier, il y a aussi un scénario écrit comme peu on en fait d'aussi remarquables dans leurs choix dramaturgiques signifiants par nos jours...il y a aussi le découpage inoui du film par Scorcese et son oeil général et particulier du cadre de la direction d'acteurs et du montage parallèle comme personne ne sait s'en servir mieux depuis Griffith le grandiose pour l'éthique, Ford pour le suspense, et à l'autre bout Murnau pour le dépouillement de la mélancolie du temps et la dérision de la vie sociale dans le tragique "Aurore"... New-York oui. "L'aurore" tourné in situ dans les années 30 nous en parle autrement, juste un peu plus tard que la période où Ashbury en fit ce récit... quand aujourd'hui on ne parle mieux de cette ville et des livres ou des films en retraçant l'histoire, que loin de son actualité topologique. Ni bien ni mal: juste l'horreur anthropologique de la modernité et prédictive de ce qui succède à la post-modernité. Le cannibalisme sous toutes ses formes. Les dramaturges grecs savaient maîtriser la traduction des mythes pour en rendre l'image représentative et édifiante, et actualisée, devant leur communauté. Cet engagement. http://www.gangsofnewyork.com (Ne pariez pas sur les golden Globes qui ne désignent pas le public en masse des oscars... ce film a côuté une fortune, souhaitez qu'il ne fasse pas un bide à travers une limitation au public d'art et d'essai: ce ne serait pas à juste titre pour ceux qui se détournent parfois de l'univers des journalistes on TV). < n e t t i m e - f r > Liste francophone de politique, art et culture liés au Net Annonces et filtrage collectif de textes. <> Informations sur la liste : http://nettime.samizdat.net <> Archive complèves de la listes : http://amsterdam.nettime.org <> Votre abonnement : http://listes.samizdat.net/wws/info/nettime-fr <> Contact humain : [email protected]