Aris on Sun, 11 Jan 2004 14:24:41 +0100 (CET)


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[nettime-fr] Qui veut la mort des SHS ?


Qui veut la mort des SHS ?

Alors que la demande d'expertise en sciences humaines et sociales (SHS) 
est en constante augmentation dans l'action publique, les SHS sont 
aujourd'hui les plus mal loties de la politique de la recherche. Elles 
sont cantonnées au rôle de « supplément d'âme », d'une science 
potentiellement « dangereuse » (C. Haigneré in Lettre à tous ceux qui 
aiment l'école). Pourtant M. Luc Ferry, agrégé de philosophie et de 
science politique, s'il ne veut pas renier la formation qu'il a suivie, 
doit reconnaître que ces disciplines sont importantes pour la société.

Le budget 2004, lui, ne va pas dans le sens de cette reconnaissance et 
affecte en particulier les jeunes chercheurs, qui sont souvent les 
chercheurs confirmés de demain. Les conditions des doctorants sont en 
effet le plus souvent précaires. A moins d'obtenir l'une des rares 
allocations de recherche (1177 en SHS pour près de 40 000 doctorants 
pour 2701 en sciences dures pour 20 000 doctorants), le travail 
intellectuel des doctorants est dominé par une incertitude matérielle 
extrême. L'enchaînement de petits boulots retarde l'aboutissement de la 
thèse. alors que les doctorants participent activement à la recherche et 
aux enseignements dispensés à l'Université. On devient généralement 
docteur à 30 ans et les perspectives d'emploi sont quasi nulles.

Or, pour la première fois depuis des décennies, aucun poste n'est crée 
cette année dans les universités. Le CNRS supprime des postes titulaires 
pour la deuxième année consécutive et sa direction annonce cette 
tendance comme une politique de long terme. Le manque d'enseignants en 
SHS débouche sur des amphis surchargés où seuls les plus dotés 
culturellement et socialement pourront tirer leur épingle du jeu. Cette 
faiblesse de l'encadrement fait de l'« Université pour tous » une vaste 
illusion.

Cela ne semble pas gêner le gouvernement actuel, qui annonce à la fois 
qu'un départ à la retraite sur deux ne sera pas remplacé et qu'il manque 
18 000 postes pour assurer un enseignement de qualité dans les 
universités. D'après les chiffres de l'Union européenne, l'Europe a 
besoin de 600 000 chercheurs supplémentaires d'ici à 2010 pour rester 
compétitive face aux Etats-Unis. Peu regardant sur ses paradoxes, le 
gouvernement français affirme « compenser » les suppressions de postes 
statutaires par des contrats à durée déterminée. Pour rendre les 
carrières d'enseignant et de chercheur attractives en France, il faut 
proposer autre chose qu'une précarité institutionnalisée et chichement 
rémunérée !

Engager une entreprise de démantèlement de la recherche et de 
l'enseignement des sciences sociales conduirait pourtant d'abord à une 
mobilisation sans précédent des étudiants engagés dans ces filières, eux 
qui ont déjà le sentiment d'être les parents pauvres de l'enseignement 
supérieur ; à l'exaspération des jeunes chercheurs, ensuite, qui 
n'auront d'autre choix que l'exil ; à l'affaiblissement durable de la 
position de la France dans des disciplines que personne ne pourra juger 
secondaires : sciences économiques, sciences de gestion, sciences de 
l'éducation, sociologie, science politique, droit, anthropologie, 
psychologie, histoire. Cela conduira surtout la France à se priver d'une 
source d'intelligence collective indispensable à la résolution des 
problèmes auxquels notre société se trouve confrontée (ville, éducation, 
valeurs, économie, démocratie, relations interculturelles, droit et 
justice, santé publique, éthique.)

Pour donner à la 4ème puissance économique mondiale les moyens d'une 
recherche ambitieuse, nous appelons le gouvernement à « revoir sa copie 
», à reconsidérer sa politique à l'égard des sciences humaines et 
sociales. Nous demandons l'application du texte signé lors du sommet 
européen de Barcelone (2001), visant au rattrapage du niveau de 
l'enseignement et de la recherche par rapport aux Etats-Unis. Dans 
l'immédiat, nous demandons la transformation des CDD en CDI. A moyen 
terme, il faut, plutôt que d'en supprimer, créer des postes 
d'enseignants et de chercheurs et garantir la dotation des laboratoires. 
L'investissement dans la connaissance doit être une vraie priorité 
nationale. Que le gouvernement fasse ce qu'il s'est engagé à mettre en 
ouvre : « Réinscrire la science dans la société » en luttant contre « la 
désaffection des jeunes pour les carrières scientifiques » et endiguer « 
l'exil des cerveaux les plus brillants » (C. Haigneré, Le Monde, 5 
décembre 2002).

OUI ! L'investissement dans la recherche et l'enseignement en SHS est 
rentable pour une nation sur le court, le moyen et le long terme ! !

OUI ! Au-delà d'un « supplément d'âme », la recherche et l'enseignement 
en sciences sociales contribuent à l'intelligence collective d'un pays ! !

Pour signer la pétition individuellement ou collectivement, veuillez 
nous renvoyer le texte par mail ou par courrier :

- par mail : [email protected] en précisant dans l'ordre : nom, 
prénom, statut, discipline et Université.
- Par courrier à l'adresse : ANCMSP, Paris I – UFR II, 17 rue de la 
Sorbonne 75231 Paris cedex 05

Premiers signataires :

Association des enseignants chercheurs en science politique (AECSP) 
Association nationale des candidats aux métiers de la science politique 
(ANCMSP)




 
 
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