Aliette on Thu, 13 Jul 2006 15:08:19 +0200 (CEST)


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[nettime-fr] Du football comme affaire d'État (persiste et signe;-)


Oui Zidane a joué avec le feu, mais Zidane : et si c'était du feu lui-même
en lui/ au sein de tous?

Ce qui signifie d'abord qu'on ne puisse attendre de lui qu'il soit l'eau (il
arrive que le feu ronronne tranquillement sans danger dans une cheminée même
si le feu brûle ou détruit;-) et plus encore, qu'en amont de ce défi
persistant, restent deux points :

? qu'un geste libre par une personne sur laquelle repose autant d'intérêts
financiers ne puisse être suivi de commentaires libres de ce geste par son
protagoniste. De votre côté respectif, en tant que journalistes membres du
dispositif de l'argent de la communication et de la publicité, vous ne
pouvez extraire à la fois le beurre et l'argent du beurre des stars que vous
interviewez, seulement leur énigme et leur mur d'opacité médiatique. C'est
déjà beaucoup de le donner à ressentir au public pour qu'il ne soit pas
dupe. 

? le second point : si l'affaire Zidane est devenue "une affaire d'État"
comme on a pu le lire dans certains journaux, autant dire, compte tenu des
règles de la FIFA qui tout de même proscrivent le racisme, si on se demande
où celui-ci pourrait clairement se formuler ailleurs que dans les mots
accompagnant ou précédant les gestes, or les mots n'étant pas punis sur le
terrain mais l'acte matériel lui-même (pouvant toujours avoir de toutes
autres causes d'agressivité), à quel point le malaise plane sur les fausses
règles éthiques de la FIFA : sauf si l'insulte raciste était reconnue au
terme d'un recours.

A ce point de logique et de politique, il est remarquable que Zidane ait été
particulièrement soigneux de s'en tenir à avouer l'insulte communautariste
sibie, quoique reconnaissant que nous sachions d'ores et déjà tous, après
les décryptages des vidéos informés dans la Presse, de quelles insultes il
fut victime [dont racistes]. Autant dire, encore, s'il était prié de ne pas
mettre en cause la FIFA, dans la mesure où non seulement elle devrait
annuler le résultat de la World cup, mais de plus dans un contexte où l'État
italien lui-même en serait humilié, au moment même de sa tentative de
reconstruction contre-berlusconienne : c'est désigner non seulement la
pression étatique inter-locale franco-italienne solidaire derrière cette
histoire, mais encore la pression cenrale européenne inter-solidaire,
serait-ce à juste titre, du nouveau gouvernement Prodi.

Donc on verra bien s'il lui sera fait réparation, à Zidane, mais que la
partie raciste de l'insulte disparaisse une fois pour toutes des mémoires,
même si l'insulteur italien devait en retenir la moindre sanction au titre
de la par d'atteinte communautaire sexiste ou familiale, ce qui est
sensiblement différent de l'atteinte raciste, mais qui pourrait sauver
l'honneur des plaignants (quoique les rabaissant représentativement de la
cause publique collective à la cause du respect de l'ordre communautaire,
privé), il ne faudra pas s'en étonner.

En quoi, on peut comprendre, peut-être, la révolte visiblement persistante,
quoique apparemment maîtrisée, de Zidane, même si elle entraînera
probablement un grand changement dans les règles du football (les vidéos non
seulement attestant des coups mais de plus, de leur précession donc de
l'existence ou de la non existence des causes ?sinon l'écoute des mots
pouvant toujours faire ensuite l'objet d'une enquête? du moins à chaud, dans
un premier temps valant deux cartons rouges au lieu d'un. Il restera que
justice lui sera probablement faite pour le principe de la FIFA, non sur le
principe même de la réplique de Zidane, car ce ne sera pas au nom de la plus
large cause qui lui sera concédée qu'il ne fut pas délinquant mais
responsable ? y compris sur le plan éthique par rapport à sa propre équipe.

Zidane est donc, de toutes façons un héros sacrilège fondateur, mais fondé
en part maudite de son propre sacrifice symbolique d'homme public collectif
rabiassé au domaine privé, par le pouvoir.

Affaire d'État, en effet, ce n'est pas une formule dans ce cas.
L'humiliation est là de toutes façons et pour le prix du pouvoir au dessus
des vertus critiques essentielles qui fondent la citoyenneté en politique.

Voilà de quoi laisser le feu couver. Mais l'accord tacite par l'État sur le
principe légitime de la violence de réplique communautariste aux menaces
identitaires, substitué à la reconnaissance de la condition politique de la
violence et au statut public citoyen du footballeur (fut-il professionnel il
est l'objet du respect général des droits de l'homme et les représente),
est-il vraiment plus exemplaire, collectivement, qu'une réplique
individuelle caractérielle (quand c'est le cas), donc non légitime, sur le
terrain de jeu d'une équipe entière, et qui représente une population
publique sous le régime non communautaire du consensus des droits ?

Alors on accepte toute extrême droite communautariste ou identitaire au nom
de ces principes. C'est beaucoup dévoiler sur l'esprit qui traverse la
France actuellement et des jours prochains qu'elle prédit, si un événement
populaire médiatique en temps réel des médias (donc incontestablement réputé
connu), comme celui-ci, peut encore se manipuler après coup, à l'aube des
prochaines présidentielles.

Tout cela est bien lamentable... Sauf à arrêter enfin d'en faire une
question à laquelle Zidane, s'il était n'importe quelle personne pourrait
répondre personnellement. Ce qu'il n'est en aucun cas.

La vérité n'est pas à découvrir de son côté mais de celui qui lui demande de
se taire sur toute la vérité : agent, entraîneur, président de la république
de référence, président de la FIFA, ou autre.

Est-ce à dire que la seule sagesse publique possible à retenir au delà de
tels enjeux serait dans la remarque de Thuram... À savoir le lobby du
football tu le joues ou tu t'en vas, mais si tu le joues tu n'as pas le
choix : tu encaisses jusqu'au bout. Ce serait donc un lieu absolu de la
perte du politique des jeux à l'horizon des masses, une fois encore et comme
toujours depuis les jeux de Berlin en 1936?

Ou enfin le stade pourra-il changer ?

On verra bien quels propos de Materrazi seront retenus en fin de compte, au
terme du verdict puisque verdict il y aura... Et l'on saura alors si Zidane
se réservait pour attendre la cause et le respect du jugement, ou s'il était
en effet, déjà, politiquement vaincu. Serait-il celui qui inaugure de toutes
façons un changement radical, dans les règles de l'arbitrage de sa
discipline.

L.

(réponse à un article de Libération : "Je ne regrette pas"
http://www.liberation.fr/actualite/sports/193097.FR.php



 
 
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