Zarana Papic on Thu, 20 May 1999 15:38:28 +0200


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Syndicate: [Fwd: Serbie: Lettre aux ONG serbes (Comité Helsinki Norvège & FIDH), 18-05-99]


-------- Original Message --------
Subject: Serbie: Lettre aux ONG serbes (Comité Helsinki  Norvège &
FIDH), 18-05-99
Date: Thu, 20 May 1999 13:49:19 +0200
From: Le Courrier des Balkans <[email protected]>
To: [email protected]

Lettre aux organisations non gouvernementales (ONG) serbes concernant
l'appel du 6 avril des ONGs de Belgrade, de la part du Comité Helsinki
norvégien et de la Fédération Helsinki internationale des droits de
l'Homme

Oslo et Vienne, le 18 mai 1999

Chers amis et collègues,

En tant qu'organisations des droits de l'Homme dont le but est la
protection de la société civile, et après avoir travaillé avec certains
d'entre vous pendant de nombreuses années, le Comité Helsinki norvégien
et
la Fédération Helsinki internationale des droits de l'Homme se déclarent
sérieusement interpellés par votre appel daté du 6 avril. Le Comité
administratif de la Fédération Helsinki internationale, qui s'est réuni
à
New York les 8 et 9 mai, a longuement parlé de votre appel. Rappelons
que
la protection des défenseurs des droits de l'Homme et des militants des
droits civiques de Serbie reste l'un de nos principaux messages envoyés
aux
décideurs et aux médias en Europe, et que nous sommes à l'origine de
campagnes de soutien et de la diffusion de lettres de la part
d'intellectuels et d'esprits indépendants serbes.

Nous sommes toutefois extrêmement perturbés par l'appel du 6 avril - et
par
les lettres ouvertes et les appels qui s'en sont suivis de la part
d'intellectuels de Belgrade. Cet appel du 6 avril reflète un point de
vue
sur la crise du Kosovo auquel nous ne pouvons souscrire, et nous
souhaitons
par conséquent clarifier notre position sur la question. Des membres de
divers Comités Helsinki, ainsi que les médias, ont recueilli les
témoignages de nombreux Albanais du Kosovo arrivés en Albanie, en
Macédoine
et au Monténégro. Leurs témoignages permettent de confirmer sans aucun
doute possible qu'ils ont été chassés de leurs maisons par la police
serbe
et les forces paramilitaires, et que des milliers d'entre eux auraient
été
systématiquement tués, blessés, violés et volés. Il s'agit d'un
nettoyage
ethnique dont l'ampleur est horrifiante. Les bombardements de
l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (OTAN) et les actions
militaires de l'Armée de libération du Kosovo (UCK) n'endossent en aucun
cas la responsabilité de l'exode sans précédent que vous décrivez. Sur
la
base des informations très complètes que nous avons recueillies au sujet
de
la catastrophe qui frappe le Kosovo, nous considérons qu'il est
extrêmement
douteux d'un point de vue intellectuel autant que moral de considérer
ces
campagnes sur un pied d'égalité.

Nous respectons votre combat solitaire et courageux pour la
démocratisation
de la République fédérale de Yougoslavie (RFY): c'est une lutte que nous
soutenons depuis des années. Mais malheureusement (et nous espérons bien
nous tromper dans notre jugement) il nous semble que très peu de vos
concitoyens ont réellement soutenu les efforts pour un règlement juste
de
la crise du Kosovo, et que cela fait des années que cette crise est
bloquée
dans une spirale de radicalisation. Par conséquent, lorsque vous dites
que
l'intervention militaire de l'OTAN a détruit tous les résultats obtenus
jusqu'à présent, la question se pose de savoir si la signification et
l'ampleur de ces résultats étaient telles qu'ils apportaient un réel
espoir
de résoudre les problèmes du Kosovo de manière pacifique.

A la fin de la période de négociations de Rambouillet, il nous a semblé
évident qu'il fallait oublier tout espoir de règlement politique de la
crise. Le régime faisait fi de la pression internationale - et nationale
-
visant à une solution pacifique, et a continué à préparer sa campagne,
qui
fait actuellement rage au Kosovo. Comment répondre à de tels préparatifs
de
crimes d'une telle gravité? Là se trouvait le dilemme auquel la
communauté
internationale a dû répondre en mars. Vous devriez également prendre en
compte (même si vous ne soutenez pas cette thèse) qu'en principe,
l'intervention de l'OTAN ne représente pas un acte arbitraire
d'agression.

Nous comprenons tout à fait la situation extrêmement difficile dans
laquelle vous vous trouvez, mais nous ne pouvons souscrire aux
conclusions
que vous tirez quant à savoir qui est responsable en premier lieu
d'améliorer cette situation. Selon nous, votre appel aurait dû être
envoyé
à la RFY et aux autorités serbes qui sont responsables de crimes de
guerre
et de crimes contre l'humanité au Kosovo, dont la nature est grave et
systématique, et des dangers dont vous, membres du secteur civil de
Serbie,
êtes actuellement victimes.

Sachez que nous vous sommes solidaires. Nous reconnaissons également les
sacrifices que vous devez faire, et les dilemmes et paradoxes auquels
vous
faites face en tant que victimes d'un gouvernement dont vous ne pouvez
soutenir la politique, sachant que vous devez payer le prix des efforts
à
faire afin que le gouvernement finisse par agir en respectant les
standards
d'une société civilisée. Nous espérons que par notre travail notamment,
l'énorme responsabilité prise par les Etats de l'OTAN en lançant cette
intervention militaire entraîne un soutien encore plus sincère du
secteur
civil parmi la population serbe: cet appui est plus que jamais
nécessaire
au retour de la Serbie dans l'Europe. Et si les Etats occidentaux ne
reconnaissent pas la nécessité de ce type de politique, il restera
difficile de décrire les actions actuelles de l'OTAN comme une
intervention
humanitaire.

De nouveaux défis nous attendent pour bientôt. Cette lettre cherche à
ouvrir le dialogue sur ce que nous pouvons faire, ensemble, pour
protéger
les forces indépendantes à l'intérieur de la société serbe afin de leur
permettre de refaire surface après la guerre. Nous attendons vos
conseils
sur la façon dont nous devrons agir de l'extérieur, face à la nouvelle
situation, et sur notre aide par rapport aux problèmes actuels.

Aaron Rhodes 
Bjxrn Engesland
Directeur administratif et secrétaire général du Comité Helsinki
norvégien.
Comité administratif de la FIDH: 
Ludmilla Alexeyeva 
Ulrich Fischer 
Stein-Ivar Aarsfther 
Sonja Biserko 
Holly Cartner 
Bjxrn Emgesland 
Krassimir Kanev 
Andrzej Rzeplinski


(traduit par Emmanuelle Rivière)

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